mercredi 25 juin 2008

Tous les matins je me lève



Vous voulez savoir une chose, Boltanski ? Tous les jours je me lève à midi. Tous les jours. Et ça ne m'empêche pas de vivre, d'élever mes enfants, de me taper un cent soixante sur la route de la côte et de rejeter les poissons à la mer.
Je n'ai jamais pu m'entendre avec des gens comme vous, parce que vous vous comportez comme si les accidents de voiture n'existaient pas. Mais ils existent, monsieur Boltanski. Et ce sont parfois les meilleurs élèves des auto-écoles qui les provoquent.





(Tous les matins je me lève - Jean-Paul Dubois - Laffont - 1988)

jeudi 19 juin 2008

Mimi 86...

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"Ben dis donc c'est pas gai ton truc..!"
Oui, je sais, je casse l'ambiance, mais en même temps, tu l'as vue l'ambiance..?
J'y peux rien moi si quand on vit trop vieux on enterre tous ses potes..!

Et j'y peux rien non plus moi si on est le dix-neuf juin, et qui dit dix-neuf juin dit dix-neuf juin quatre-vingt six, et qui dit dix-neuf juin quatre-vingt six dit Coluche. (bon, ok , j'avoue, j'ai fait un copier-coller...)

Ce jour-là, après m'être fadé tout le long des vacances les hordes de supporters ibériques du "mùndial" comme ils disaient, j'étais de retour d'Espagne avec mes grand-parents maternel dans leur 305 bleue métallisée, vitres électriques, quand le poste a craché que Michel Colucci avait cassé sa pipe dans un accident de moto, sur la route de Grasse.
C'est marrant, en fermant les yeux je peux revoir avec exactitude le décor, alors instantanément figé. Une longue portion d'autoroute en montée, coincée entre les arbres. Ça me l'a fait aussi pour Gainsbourg et Ferré. Pour Brel, je m'en rappelle pas bien parce que j'étais pas né.

Coluche, il m'avait tenu compagnie sur la platine de mon père quand j'avais peur de camper dans le jardin et que je dormais tout seul à la maison pendant que les autres faisaient les cons dans la tente. Il y avait un disque : "Mes adieux au music-hall". Je comprenais pas tout, mais en tout cas, quoi de plus logique que de mourir après ses adieux... pour moi Coluche c'était surtout ce disque. Pas un de ceux où s'enchainent ce qu'on appelle les "sketches" (que c'est laid...), qui racontent en général une petite saynète jouée par un personnage fictif. Non, c'était Coluche qui nous parlait, me parlait, commentait l'actualité, la politique, racontait son enfance, ce que l'on appelle maintenant le "stand-up", qui apparemment est devenu nouveau (je me marre...), en tout cas au moins autant que le slam de Ferré dans les années 70...


Je me rappelle, je t'avais fait croire que sur la pochette il était pas maquillé, que son nez était vraiment rouge naturellement, mais je suis pas sûr que tu m'avais cru... Dans ses lunettes était écrit comme à la main "à Véronique". Je me disais que ça devait être sa chérie et qu'elle devait être vachement fière...

Et puis il y avait eu Tchao Pantin, vu en cachette à la télé, et une grande gifle. De la poésie, de la noirceur, du cambouis, et un truc comme de l'amour, avec la jeune et libre "Lola" (Agnès Soral) qui m'avait fait comme une drôle de sensation dans le bide...

dimanche 15 juin 2008

Petit inconnu...

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Tu étais là, attentif, absorbé, accroché à la moindre grappe d'accord, au moindre souffle guttural. je ne t'ai même pas vu manger, tu n'as pas quitté ta chaise deux heures de rang attendant avec impatience après chaque pause que les morceaux s'enchaînent à nouveau comme les perles d'un collier.
Tu m'as donné une coquille d'escargot comme un trésor déniché dans les graviers du jardin, il a rejoint la cravate du Québec libre dans la malette qui mine de rien commence à se remplir au fil des semaines...
Tu m'as demandé mon prénom, je ne connais même pas le tien. Merci minot.

samedi 7 juin 2008

Transit...

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Je ne suis pas plus dépendant ou handicapé du fait de ne pas pouvoir prendre l'avion que toi de ne pas pouvoir ne pas le prendre. Dans les deux cas, une des deux alternatives nous est impossible.

Chacun sa manière de prendre de la hauteur...

mercredi 4 juin 2008

Pedigree...

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Restons dans le domaine de la pensée critique, qui finalement est peut-être la base de toute architecture, tout raisonnement sensé. Allons droit au but. Quel peut donc en être le pire travers ? Le pire ennemi ? Le temps et la place pour les énumérer nous faisant défaut, considérons le plus insidieux, le plus vil et en définitive le plus contradictoire pour ceux qui auraient vite fait bien fait de se compter dans l'avant-garde. N'ayons pas peur des mots, le plus grand viol psychologique est sans doute celui qui nous guette si on ne prend aucun recul sur les choses et sur soi-même : La pensée circonstantielle, orpheline.
Changer de discours selon les conjonctures, l'affectif et la connivence, changer de manière de penser, pire, révéler finalement que l'on a aucun cheminement de cette pensée, mais que c'est l'opportunisme, ou mieux l'opportunité qui dirige nos pas. Qu'un fait, sa cause et sa conséquence puisse changer selon le cas ou la personne est le pire des schémas envisageable.
Prenons un exemple classique, donc anodin, mais précis. Celui pour lequel on vous reprochera une fois encore d'exagérer.

Des amis (proches c'est mieux) vont manger "Chez Etienne", au Panier. Institution Marseillaise (de moins en moins...), ce restaurant a la particularité de faire payer à la gueule du client, genre plus tu viens avé l'assent, moins c'est cher. Super-drôle selon mes amis, d'ailleurs marseillais, et qui connaissent un peu le patron. A pisser dans sa culotte selon les autres, qui ne font pas parti du truc, de la famille, de la caste, de la race. j'aurais bien rigolé avec vous, mais j'ai les lèvres gercées...

Alors, pour pas me fâcher avec mes amis, que je compte sur la main gauche de Django Reinhardt, je vais encore fermer ma gueule et tant pis pour les ulcères. Je vais les laisser croire que la plaisanterie peut couvrir les préceptes les plus dangereux. C'est ça ou j'endosse ipso facto les frusques du râleur, jaloux, associable, le fameux, l'aigri, le frustré. Allez tous vous faire pénétrer par le fascisme rampant dans la jovialité. Je suis désolé mais par réflexe je me mets du côté des opprimés... Tant pis si on doit de retrouver face à face...
Alors pour en revenir à l'histoire, certains vont penser qu'on est en colère de vexation, parce qu'on a payé plus cher, et rabaissent à nouveau au ras des paquerettes le vrai débat qui peut avoir lieu derrière cet anecdote à première vue sans importance. Finalement, je crois que ce qui me rendrait le plus mal à l'aise serait la compromission, impossible de partir sans casquer au plus large... J'te crâme à la gueule un bifton à la Gainsbarre.
Mais excusez-moi, ça fait parti de la tradition, j'avais mal compris, pardon, j'aurais peut-être dû emmener ma fille à exciser, ou à vendre... C'est une galéjade ? ça fait parti de l'esprit marseillais peuchère ! Ce doit être comme la crasse, l'éliminer revient à tuer Marseille, malheureux !

Demain, à mon tour, je te parlerai d'un endroit ou le tarif n'est pas le même pour les noirs, les arabes, les juifs, les pédés. Ou les hommes et les femmes (genre boites de nuit..!). Tu te révolteras, en appelant aux droits de l'homme et à la saloperie de ce monde que tu enfantes également, comme eux, dent gatée pour dent gatée. Tu crieras au fascisme sans te rendre compte que tu en es le pire représentant car tu avances masqué. Des autres et de toi-même. Et moi je te répèterai que je préfère encore les vrais salauds, ceux qui assument, qui ont choisi leur camp, dans la sincérité et en toute loyauté. Peut-être pensent-ils de travers, mais en toute franchise, de toute leur âme, dans la conviction bordel..!

Ce soir, tu rentreras chez toi boire ton café Max Havelaar dans des espadrilles conçues sans chlore, t'auras bouffé tes cinq putains de légumes, tu choisiras ton programme vespéral, probablement Artésien, en oubliant simplement le fait que tu es complice, que tu as payé (moins cher, c'est vrai...), et que dans tout système réactionnaire il y a une chaîne dont tu es un des maillons.
Il y a des endroits dans ce cher pays où on est honoré par le fait que les gens se déplacent pour découvrir votre région, votre ville, votre patrimoine, votre culture, et où on vous offre l'apéro sans discours, sans le crier sur les toits. Ici, l'étranger est mauvais, forcément, puisqu'il est différent. On ne trie plus par race, religion, pays, région, mais à l'estampillage, à la tronche et à l'accent, le sceau de la bêtise faisant foi.
Si tu acceptes qu'un parisien ou un lyonnais paye plus cher que toi, tu es associé, complice, et par là-même coupable. Tu ne vaux pas plus cher que le pire des ennemis que tu crois combattre en de beaux discours bienséants...

Mais tu dois avoir raison, je divague, je confonds tout, je dramatise, je délire.

Bon appétit.